Tout à commencé un soir de confinement lorsque je reçois un mail d’une copine avec pour objet “surf et effondrement”. Il n’en fallait pas plus pour attiser ma curiosité… Ni une ni deux j’abandonne tout ce que je fais et je clic pour ouvrir le mail.
Je découvre alors une interview vidéo de Nicolas Meyrieux qui parle d’écologie, d’agriculture et… de surf !
Je connaissais Nicolas pour ses vidéos drôles et engagées avec sa chaîne YouTube La Barbe mais je ne connaissais pas son penchant pour le surf.
Dès la fin du visionnage, j’attrape mon clavier et j’envoie un message à Nicolas pour lui présenter le concept de La Green Session. Pour être honnête avec toi, j’avais peu d’espoir qu’il me réponde…
Mais que nenni ! Non seulement Nicolas a répondu rapidement à mon message mais il a accepté de se soumettre à la très célèbre (bon je m’emballe un peu…) interview des Green Riders.
S’en est suivi un super échange de 2h pendant lequel Nicolas m’a partagé son histoire, son parcours professionnel, sa vision de l’écologie ainsi que sa passion pour le surf et tous les sports de glisse en général.
A mon tour maintenant de partager avec toi cet échange très inspirant. Dans cet article tu découvriras notamment pourquoi Nicolas a vécu sous un pont à Hossegor, comment il a réussi à devenir un humoriste reconnu et comment il a changé radicalement de mode de vie pour passer de Paris à Capbreton…
Salut Nicolas, peux-tu nous raconter ton histoire en quelques mots :
Je suis né à Grenoble, j’ai 34 ans, j’ai fait des études de médecine et de kiné pour faire plaisir à mes parents puis j’ai très vite arrêté pour réaliser mon rêve : devenir comédien. Depuis que j’étais gamin je voulais devenir comédien et mes parents m’ont jamais suivi. Quand j’ai eu 21-22 ans je me suis dit que je vivais pour moi et pas pour mes parents… du coup je me suis barré à Paris. Je leur avais dit que j’étais en vacances chez un pote alors qu’en fait je m’étais inscrit à un stage de théâtre aux cours Florent.
C’était la première fois de ma vie que je faisais du théâtre et ça a été la révélation, j’ai trouvé ça génial. Une fois rentré de vacances, j’ai annoncé à mes parents que j’arrêtais mes études de kiné pour partir à Paris. Mes parents et ma famille ont arrêté de me parler pendant un bon moment.
A oui carrément… ça a été jusque là ?
Oui mais il faut comprendre le contexte. Je suis parti de chez moi à 17 ans après m’être battu avec mon père. Mes parents ont eu un parcours difficile. Ma mère est fille d’émigrés algéro-espagnols et elle est devenue médecin. Elle a grandi en cité avec une mère femme au foyer et un père ouvrier. Du côté de mon père, son père était berger puis est devenu kiné.
Donc j’ai deux parents qui sortent de milieu très très populaire et qui s’en sont sortis par les études. Donc quand ton gamin te dit qu’il veut être saltimbanque, dans la tête de tes parents c’est juste pas possible. Dans leur esprit si tu ne connais pas des gens dans le cinéma et que tu n’as pas de contact c’est impossible de faire du cinéma ou du théâtre ou ce genre de chose.
Ça va mieux maintenant ?
Ah oui maintenant j’ai de très bonnes relations avec mes deux parents mais c’est comme tout en fait. C’est l’ancien monde, on mise beaucoup sur le confort, le matériel, le salaire. Mes parents ont des professions plutôt respectées… Ce sont des bourgeois quoi !
« Je suis un bourgeois moi aussi alors qu’il y a encore quelques années j’étais au RSA »
Qu’est ce qui se passe après le stage aux cours Florent ?
Je monte à Paris, je fais les cours Florent mais pas longtemps car je découvre l’univers du stand-up et je trouve ça génial. Je me casse et je commence à faire des scènes ouvertes. Et puis je me prends un four et ça me fait trop flipper. Je décide alors d’arrêter cette activité pendant quelques années.
Je continue d’aller dans les comedy club, les cafés théâtre mais en tant que spectateur. J’admire les comédiens qui sont aujourd’hui ultra connus comme Kyan Khojandi, Baptiste Lecaplain ou encore Vérino. A ce moment là ils n’étaient pas encore connus. Je les ai vu dans de toutes petites salles et je les observais, je regardais comment ils faisaient.
Et puis après il m’est arrivé une merde, je me suis fait agressé dans mon quartier. J’habitais un quartier un peu chaud sur Paris et j’ai décidé de lâcher mon appart. Au même moment je me suis fait licencié de mon petit boulot et je me suis retrouvé à la rue pendant deux ans.
Tu allais de canapé en canapé chez des potes ?
Exactement. C’était vraiment très dur. A ce moment là de ma vie, je n’avais plus de famille, plus de logement, plus de travail… bref, plus rien.
Vu que j’ai touché un peu à la comédie, je commence à faire des vidéos sur Dailymotion. Mais le problème avec Dailymotion c’est qu’il n’y avait personne. La meilleure vidéo avait fait 10 000 vues. Et c’était énorme pour Dailymotion mais j’en vivais pas. J’empruntais la caméra de mon petit frère. Je filmais chez les gens la nuit ou quand ils n’étaient pas là.
Je ne me sentais vraiment pas bien, j’étais dépressif.
« Je me suis demandé ce qui pouvait me ramener à la vie, ce qui pouvait me faire du bien… Et la réponse fut… le surf ! »
Du coup je me suis cassé à Hossegor en 2010. Je vivais sur les quais et j’ai dormi dans une tente sous les ponts du lac pendant un mois.
Tu connaissais un peu de monde sur Hossegor ?
Personne, je vivais tout seul avec ma bite, mon couteau et une planche de surf (rires)
Et puis j’ai trouvé un boulot au Mar y Sol qui est ensuite devenu La Maison Blanche. J’ai pas galéré longtemps. Au bout du troisième jour il m’avait embauché en tant que serveur/chef de rang.
Grâce à ma première fiche de paie j’ai pu avoir un appart mais ce qui était ouf c’est que pendant mon premier mois de travail, je me douchais sur la plage et je dormais dans ma tente sur les quais… c’était en mode galérien.
J’ai vécu pendant un an à Hossegor. Puis mon deuxième frère, qui venait d’avoir son bac, m’a dit qu’il avait envie d’être réalisateur et qu’il allait monter sur Paris. Il me propose alors de le rejoindre pour retenter ma chance. Et j’ai dit banco !
Du coup en octobre 2011 je quitte Hossegor pour aller monter une colloc avec mon petit frère à Nanterre. Je me remets à faire de la scène et des vidéos.
Et quand tu étais sur Hossegor, tu continuais tes vidéos ?
Non. Je profitais de la vie. C’était une renaissance pour moi. J’avais vraiment passé des années horribles. C’est marrant parce qu’il y a quelque chose d’assez similaire avec ce que tu as écris dans ton article sur les Green Riders qui peuvent sauver le monde.
Je n’ai jamais été aussi heureux dans ma vie qu’à cette période parce j’avais une vie très simple et j’étais peu informé. Je profitais de la vie sans avoir dans ma tête cette espèce de mélodie que l’on a tous maintenant en fond de cerveau : se dire que c’est la fin du monde si on ne fait rien.
J’ai passé la meilleure année de ma vie. Je gagnais de l’argent, j’avais un super appart, je faisais du surf tous les jours, je faisais plein de rencontres… J’avais vraiment la vie de rêve.
« Je suis passé du pire moment de ma vie au meilleur et aujourd’hui je suis entre les deux.«
Et ce n’était pas trop dur de repartir sur Paris ?
En fait c’est très bizarre. La vie à ce moment là était trop bien mais elle était trop simple pour moi. Je savais que j’avais un truc à faire. J’allais faire quoi de ma vie ? J’allais rester là à être serveur et à faire du surf toute ma vie ? il me manquait un truc. J’avais goûté à la scène et j’avais un goût d’inachevé.
J’avais cette petite voix à l’intérieur de moi qui me disait « mec tu n’as pas fait tout ce que tu avais à faire. Tu t’es retapé, tu as repris du poil de la bête, tu as repris confiance en toi, c’est le moment de retourner à Paris.”
Et après tout s’enchaîne très vite. Je commence à écrire des sketchs de plus en plus engagés puis je fais l’émission de Laurent Ruquier « On n’demande qu’à en rire » et je me fais repéré par mon agent.
Concrètement, comment ça se passe pour se faire repérer ?
Il y a beaucoup de gens qui disent qu’il y a une grosse part de chance dans notre métier. C’est complètement faux. Ce sont les gens qui ne connaissent pas ce métier qui disent ça. Il n’y a aucune chance, il n’y a que du travail. Quand tu travailles, ça veut dire que tu vas faire les scènes ouvertes et les comedy clubs. Les producteurs et les agents sont dans les salles, ils cherchent des gens à repérer.
Donc il n’y a pas de chance, c’est juste du travail, du travail et du travail. Et quand tu es assez bon, on vient te chercher. Et tant que tu n’es pas assez bon, on ne vient pas te prendre. Mais si tu n’es pas assez bon c’est juste que tu ne travailles pas assez. Je suis pote avec beaucoup d’humoristes très connus et ils m’ont tous donné ce secret quand j’ai commencé. Ils m’ont dit « mec quand j’ai commencé j’étais pas drôle ». C’est une chose de faire rire ses potes mais c’est une autre de faire rire les gens. C’est un vrai métier. Ça prend des années avant de comprendre ce métier d’humoriste.
Ce qui est drôle c’est qu’avant de faire cette émission avec Ruquier, je jouais en moyenne devant 8 personnes dans une toute petite salle. A partir du moment ou j’ai fait cette émission j’étais complet trois semaines à l’avance. Mais ce qui était horrible, et c’est là que tu te rends compte de l’impact de la télévision sur les gens, c’est qu’on t’oublie très vite. Si dans les trois semaines je ne faisais par un passage télé, je passais de complet à de nouveau 8 personnes.
Là ou j’ai fait la bascule c’est quand mon agent m’a mis sur un projet internet. J’ai écris un clip de rap pour les produits laitiers, chose que je ne ferais jamais aujourd’hui. Tu peux regarder sur internet ça s’appelle « je bois du lait » si tu veux te marrer 2 minutes.
A ce moment là j’étais très content de le faire car j’ai toujours adoré le rap. Et heureusement que je l’ai fait, ça m’a permis de rencontrer la productrice du clip. Elle m’a demandé si j’avais d’autres projets après. Je lui ai répondu que je faisais des vidéos sur Dailymotion avant et que ça ne marchait pas mais que depuis il y a eu le boom des podcasts, de YouTube et que je pense avoir saisi les codes.
« Je peux te proposer un programme qui fonctionne bien et ça s’appellerait La Barbe. »
Elle m’a dit ok, banco, je produis la barbe. Si tu regardes bien, les premiers épisodes de la barbe ne sont pas sur ma chaîne YouTube, ils sont sur la chaîne de aufeminin.com qui aujourd’hui s’appelle la tribu. Parce que en fait ce sont eux qui produisaient la barbe au début.
Au début tu es comédien ? Tu n’étais pas spécialisé dans l’humour ?
Oui. C’est tout simplement parce que je déteste être dépendant des gens dans la vie. C’est aussi pour ça que j’aime et pratique tous les sports de glisse. Ce sont des sports de liberté, des sports ou tu t’exprimes. Et quand tu es comédien, tu es dépendant des directeurs de castings, des scénarios, des producteurs, des réalisateurs… Tu es dépendant de toute une industrie du théâtre et du cinéma. Alors que quand tu fais du stand-up, tu es dépendant de personne. Tu écris tes textes, tu fais des scènes ouvertes. Lorsque tu es assez bon, les comedy club viennent te chercher et après oui tu peux prendre un producteur ou non.
Mais la c’est pareil, j’ai choisi de monter ma boite de production parce que j’ai tenté une aventure avec un producteur et tout de suite il a voulu me dire ce que je devais écrire. J’ai trouvé un producteur au moment ou je commençais à être humoriste engagé mais je faisais encore du stand-up de divertissement. Je me rappelle un jour il m’a dit « franchement ton spectacle il cartonne mais ça serait bien que tu enlèves les 20-30 minutes ou tu parles d’écologie.” Je lui ai répondu non. Moi je veux enlever le reste et parler 1h30 d’écologie, je ne veux pas faire l’inverse.
Comment t’es devenu un humoriste engagé ?
C’est en voyant le film documentaire Océan en 2011 que j’ai eu mon premier déclic psychologique. A partir du moment ou je vois “Océan” je réalise que, en tant que comédien, j’ai la chance d’avoir un métier de parole qui me permet de diffuser des messages. Je ne suis pas obligé de faire le guignol, je peux aussi dire des choses aux gens. C’est une révélation. Je me dis que maintenant tout ce que je vais écrire aura du sens.
Et avant Océan c’était quoi ta perception de l’écologie ?
J’en avais pas vraiment en fait. J’en avais dans le sens ou mes sports préférés ont toujours été des sports de glisse. J’ai grandi en montagne et je passais mon temps entre la montagne et la mer donc j’étais quand même sensibilisé, je voyais bien que mes sports étaient dépendants d’un environnement qui devenait de plus en plus pollué. Tu le vois vraiment mais je n’avais pas conscience à quel point c’était la merde.
« Et quand j’ai vu le film Océan, j’ai compris que l’être humain était en train de creuser sa propre tombe, pas pour les générations futures, non, pour ma génération.«
Avant j’avais juste conscience que l’être humain était un gros dégueulasse mais je ne me rendais pas compte que ça nous impactait directement aussi vite et aussi fort. Le problème c’est qu’il y a encore plein de gens qui ne s’en rendent pas compte.
C’est La barbe qui m’a mis le pieds à l’étrier, à la fois dans ce parcours de vulgarisation mais aussi cet espèce de parcours initiatique écolo qui m’a fait grandir. J’ai grandi dans ma prise de conscience grâce à mon travail. Et c’est pas l’inverse, c’est ça qui est drôle. On pourrait dire ok ce mec a une prise de conscience il a besoin de faire des vidéos pour en parler mais en fait c’est l’inverse. Plus j’apprenais des choses, plus je changeais mon comportement et mon mode de vie. Et j’avais envie de le partager avec les gens. Donc je faisais des vidéos.
Peux-tu nous expliquer comment la barbe a décollé ?
Au bout d’un moment il y a un truc qui ne colle pas entre ce que je propose et la ligne éditoriale du producteur. Et il y avait sur France 4 une émission qui s’appelait « l’autre JT » qui était la seule bonne émission de journalisme du paysage audiovisuel. Il y avait une vraie liberté de parole, le producteur poussait les journalistes à aller au fond des sujets et à tout faire sauf les censurer. Au contraire il voulait vraiment que ce soit subversif et ça l’était, c’était génial. Pour te dire à l’époque il y avait déjà Guillaume Meurice, Pablo Mira, une partie des femen… Seul hic, ça passait le jeudi soir à 23h15 (rires).
Mais c’est la que La barbe a commencé à fonctionner. Je crée alors ma chaîne YouTube et je conclus un deal avec France 4 et le patron de l’émission : on co-produit, ils diffusent sur France 4 et moi je récupère les vidéos pour ma chaîne YouTube. Et c’est comme ça que ça a commencé. Et après j’ai enchaîné car il y avait un des chroniqueurs de l’émission qui est devenu directeur de la programmation de la chaîne France info et ils voulaient diffuser La barbe. J’ai dit ok. Sur France info je faisais une vidéo par semaine et ça a marché grâce à ça car il n’y a rien qui marche mieux sur internet que la régularité.
« Je suis passé de 10 000 à 100 000 abonnés en 3 mois.«
Tu as été très régulier et tu as également bénéficié de l’audience audiovisuelle ?
Alors non ce qui est bizarre c’est que l’audiovisuelle et internet n’ont pas du tout la même audience, ça n’a rien à voir. Ce sont deux publics complémentaires. Par exemple, la moyenne d’âge d’un spectateur télé c’est 62 ans.
Et comment tu expliques que tu as explosé sur YouTube alors ?
C’est l’algorithme. Plus tu fais du contenu et plus il y a d’interactions (like, partages…) plus YouTube te met en avant. Et puis j’ai eu la chance d’avoir beaucoup de potes plus connus que moi, qui ne sont pas des youtubeurs engagés, mais qui ont participé à mes vidéos. Pour te dire ma vidéo qui a fait le plus de vues c’est celle sur la franceafrique. On est environ à 80 millions de vues sur le player de France info. Rien que sur ma chaîne elle doit être à plus de 390 000 vues. Mon autre vidéo qui a fait le plus de vues c’est avec le youtubeur Jhon Rachid. Lui il est très connu, il a des millions d’abonnés et il est venu faire une vidéo avec moi sur les inégalités scolaires.
Les vidéos qui ont fait le plus de vues ne sont pas forcément des vidéos écolo mais ça permet d’ouvrir des portes vers d’autres sujets. Ma deuxième vidéo qui a fait le plus de vues c’est celle sur le sexisme (475 000). Ma pote qui est avec moi dans la vidéo n’est pas plus connue que moi. En fait ce sont des sujets de société qui intéressent.
Tu as du te marrer à faire tout ça non ?
Ouai de ouf (rires).
Quelle est ton histoire avec le surf et la glisse en général ?
J’ai grandi à Grenoble dans les montagnes. Mes parents ne m’ont jamais amené à l’océan mais quand j’étais gamin j’étais passionné de surf alors que je n’avais jamais vu l’océan de ma vie.
« J’achetais les surf mag, les surf session, les beach brother, j’étais à fond dans ce sport sans jamais avoir touché une planche de surf. Je savais que j’adorais ça.«
Tu avais la pratique du ski ou du snowboard pour compenser ?
Tous les sports de glisse sont mes sports préférés, je les pratique tous. J’ai commencé petit par la planche à voile après j’ai fait du skate, du bmx, du roller, de la trottinette, du wake, du paddle, du snowboard, du kite et en dernier du surf mais c’est mon sport préféré.
La planche à voile sur lac ?
Oui, à Grenoble on avait plein de lacs. Et sinon chez mon grand-père à Gruissan.
Et c’est là que tu t’es mis au kite ?
Non je me suis mis au kite sur le tard à Noirmoutier. Je faisais déjà du surf que j’avais commencé à 16 ans. En fait j’avais mon oncle qui avait une pizzeria à Saint-Jean-de mont et c’est comme ça que j’ai connu l’océan en allant faire plongeur chez lui un été. J’ai donc découvert le surf à 16 ans à Saint-Jean-de-mont. J’ai ensuite découvert d’autres spots vendéens comme saint gilles croix de vie, brétignolles, bud bud… Tout ça quoi !
Et aujourd’hui tu pratiques quels sports de glisse ?
Le surf et là je me suis remis au skate de street. J’ai toujours utilisé le skate pour me déplacer mais j’avais mis de côté le street. Je m’y suis remis il y a quelques mois. Et je me suis offert du matos de kite pour mes 34 ans. Et je peux te dire que faire du kite l’été à Hossegor, ça te sauve le morale vu le monde qu’il y a dans l’eau en surf !
C’est comment Hossegor pour le kite ?
C’est ça qui est génial car le surf et le kite sont très complémentaires. Quand il y a du vent, il y a du kite et du très mauvais surf et quand il n’y a pas de vent il y a du bon surf et plus de kite. Donc c’est pour ça que j’ai envie de m’y remettre pour rider tous les jours.
Skate + surf + kite c’est le bon mélange.
Est ce que tu as vu tes spots se dégrader ?
Ce qui me choque le plus depuis que je vis ici, ce sont les micro-plastiques. Dès que la saison est terminée, les engins pour nettoyer la plage ne passent plus et tu te rends compte du nombre de micro plastiques qu’il y a… et c’est dégueulasse. Il y en a partout. Si tu ne fais pas attention tu ne les vois pas. Mais dès que tu regardes de plus près tu vois notamment des larmes de sirène (petites billes de micro plastique ) absolument partout.
C’est horrible car à chaque fois que l’on va surfer avec les potes on ramène des déchets mais on le fait juste pour se donner bonne conscience. Ça ne sert à rien. Il faut tous que l’on devienne zéro déchet. Quand j’achète un truc avec du plastique, je culpabilise vraiment. Sur les plages tu trouves de tout. C’est hallucinant de voir l’hiver tout ce qui est recraché par l’océan (des cagettes, des pneus , des jouets, des bouteilles, des coton tiges, des bidons…).
Il y a aussi la qualité de l’eau. C’est marrant parce que je lisais votre interview de Jérémie Pichon et c’est vrai que la qualité de l’eau est mauvaise. Tu le sens vraiment surtout quand il y a de grosses pluies.
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Quelle est ta vision de l’écologie après ces années à « remuer la merde » avec la barbe ? Quelles est ta vision de l’effondrement ?
C’est bizarre car tu me poses cette question en pleine période de confinement et du coup la réponse que je vais te faire est en rapport avec cette situation.
Je peux te donner ma vision avant confinement. Avant le confinement on va droit dans le mur. L’espèce humaine est une machine égoïste qui ne veut absolument pas perdre de confort et qui n’a aucune conscience de la merde dans laquelle elle se jette. Soit elle en a aucune conscience soit elle ne veut pas le voir de peur de perdre du confort.
Ce qui est très bizarre c’est qu’en ce moment tout le monde est confiné et ça va. Il y a un truc très intéressant. Le fait que l’on soit confiné chez nous et que l’on ait le droit qu’aux premières nécessités nous a poussé à réduire drastiquement notre consommation d’énergie et nos émissions de CO2. Actuellement on est en accord avec les objectifs fixés lors de l’accord de Paris. C’est à dire que si on consommait tout le temps comme en ce moment, on arriverait à limiter la hausse de la température moyenne à 2°C.
Si on va à l’essentiel, on peut y arriver. Depuis le début du confinement presque rien n’a changé dans ma vie mis à part que je ne fais pas de surf. Etant donné que je vais surfer en vélo, mon impact ne serait pas très différent. Donc ça montre aux gens que si on avait envie, on pourrait. En plus de ça les gens se rendent compte à travers les chiffres que l’air est redevenu respirable, que les animaux reviennent et que la biodiversité explose. Donc ça prouve bien notre impact en tant qu’être humain sur la nature qui nous entoure.
D’un côté on a une vraie prise de conscience que j’attendais et que la plupart des écolos attendait et en même temps le début de la grosse merde qui va arriver. Mais comme il arrive en même temps qu’une prise de conscience collective, on peut espérer que l’effondrement se passe bien. Chose à laquelle je ne croyais pas si on était dans notre bulle de croissance occidentale et si d’un seul coup une énorme crise financière arrivait avec 50% des gens au chômage… Le choc serait brutal ça pourrait très mal se passer. Mais là le fait qu’il y ait cette espèce de sas de décompression je trouve que c’est très bénéfique. Parce que ça laisse une lueur d’espoir au fait que peut être les gens après ce confinement se diront “Et si on ne reprenait pas comme avant ?”
Qu’est ce que tu penses des termes « croissance verte » ou « développement durable » ?
Ba ça me fait rire. Je trouve que c’est un très bon thème de sketch. (rires)
« Il n’y a pas de croissance verte possible si on veut un avenir durable.«
Il faut une décroissance. Pas une croissance verte, bleue ou rouge… c’est pas un power rangers (rire). Ça ne sert à rien de mettre des couleurs à la croissance, elle nous fait aller droit dans le mur.
Et qu’est ce que tu réponds à ceux qui pensent que l’écologie est un retour au moyen âge, une attaque aux libertés individuelles ?
Si on pense comme ça on va effectivement aller droit dans le mur et donc dans des restrictions de liberté individuelle. Quand on pense croissance ça veut dire surproduction donc exploitation.
On vit dans notre confort mais on prive de liberté individuelle des gens à l’autre bout de la planète que l’on ne voit pas.
Ça veut aussi dire qu’il y aura des millions de réfugiés climatique qui vont venir mourir à notre porte tout ça pour quoi ? parce qu’on aura voulu changer d’iphone chaque année, acheter un nouveau 4×4, prendre l’avion pour chaque vacances. C’est justement la croissance qui apporte moins de liberté, plus de barbarie et donc le retour au moyen-âge.
Et je crois au concept de la sobriété heureuse. Il n’y a rien qui me fait plus plaisir que de faire mon potager en ce moment. Et quand je fais mon potager, je n’abîme rien. Au contraire je crée de la biodiversité, je stocke du carbone, j’améliore le vivant. Ça veut dire que je me fais plaisir et en plus j’ai un impact positif sur la planète et sur mon corps.
Donc non l’écologie n’est pas un retour au moyen âge et ce n’est pas une privation de nos libertés. C’est un cercle vertueux en fait.
Alors comment mener cette fameuse transition vers un modèle durable ? Comment passer d’une échelle individuelle basée sur la bonne volonté de chacun à une échelle collective ?
Je ne pense pas qu’il y ait une bonne façon de le faire. Pour qu’il y ait une vrai bascule il faut que ce soit multi factoriels. Il faut que ça se passe dans plusieurs lieux et dans plusieurs groupes d’individus différents.
C’est à dire qu’on ne peut pas demander à tout le monde de devenir zéro déchet et écolo modèle du jour au lendemain c’est pas possible. Pour la simple et bonne raison que l’on vit dans un monde capitaliste et que la pensée dominante (la croissance) est contrôlée par les médias qui ne permettront jamais de changer ça. Dans cette économie de marché on y arrivera jamais.
On ne peut pas demander non plus à la majorité des gens de devenir écolos radicaux extrémistes. C’est pas possible pour les mêmes raisons que je viens de citer. On ne peut pas demander aux gens non plus de devenir tous des hippies et construire des éco-villages. Par contre on peut tous faire une de ces choses.
« Moi mon rêve c’est de construire une ferme, un éco lieu, de montrer aux gens qu’on peut vivre en étant le moins dépendant du système possible. En ayant un impact le plus positif possible sur son environnement.«
Si tout le monde décidait au sein du système de créer des éco lieux, on changerait le monde mais le problème c’est que l’on ne veut pas tous faire ça. Il y a des gens au contraire leur truc ça va être la colère. Ça va se traduire par des actions de désobéissance civile. Moi je suis pour, je les encourage à le faire mais je ne le ferais pas car ce n’est pas mon tempérament.
Me taper avec des CRS ça ne m’intéresse pas mais il faut qu’il y ait des gens qui le fasse, la violence est nécessaire. Mais la violence qui va renverser le système n’a d’utilité que si des personnes comme moi montrent q’une autre façon de vivre est possible. Sinon elle ne va servir à rien à part apporter le chaos. Pareil il faut qu’il y ait des gens qui commencent juste à découvrir, à être zéro déchet à devenir végétarien, à faire des petits gestes qui vont les amener vers autre chose.
J’ai des potes qui sont des écolos vraiment extrémistes et qui m’engueulent en me disant que je ne suis pas assez radical, que je suis sur TF1, que je suis un vendu.
Et je leur réponds : « vous pensez vraiment que les gens vont passer de “je bois du coca, je mange chez macdo, je prends l’avion” à “je participe aux actions de désobéissance civile ?”… Non, il y a des paliers.
Ce qui est très drôle c’est que pour les écolos extrémistes, je ne suis pas assez extrémiste voir même pas écolo du tout mais pour les gens qui ne sont pas écolo je suis déjà l’écolo extrémiste dans mon discours et dans ma façon de vivre. Dans ma famille je suis un écolo extrémiste alors que j’ai une vie normale. C’est juste que je ne prends plus l’avion, je suis végétarien, j’évite le plastique, je fais pousser mon potager, je me déplace en vélo et c’est déjà être extrémiste pour les gens.
« On a besoin de tout le monde pour faire la bascule. Il n’y a pas une seule façon de faire, il y a plusieurs façons de faire qui doivent converger.«
Comment tu expliques ton changement de vie ? Tu habitais sur Paris, tu as décidé il y a un an de venir t’installer dans les landes. Est-ce que tu peux nous expliquer cette réflexion qui t’a poussé à passer à l’action ?
Il y en a plusieurs. Quand je suis parti d’Hossegor en 2011, je me suis promis que dès que j’aurais réussi dans mon métier, je reviendrais vivre ici. Alors réussir c’est un bien grand mot, la réussite c’est quoi ? Pour moi la réussite c’était simplement de vivre de ce métier. Je ne cherchais pas à faire l’Olympia, je cherchais juste à vivre de ma passion. Et c’est déjà une réussite car il y a des millions de gens qui rêveraient de vivre de leur passion. Tous n’essaient pas de le faire et dans ceux qui essaient tous n’y arrivent pas. Donc pour moi j’ai réussi de ce point de vue.
Et l’autre raison c’est que la barbe m’a fait évolué, à chaque vidéo je prenais conscience d’un problème, je changeais ma façon de vivre. Par exemple lorsque j’ai fait une vidéo sur la fast fashion, j’ai arrêté d’acheter des fringues chez zara, H&M et toutes ces merdes.
Quand j’ai fait ma vidéo sur le nucléaire j’ai changé mon fournisseur d’électricité. J’ai fait une vidéo sur l’élevage intensif et je suis devenu végétarien.
A chaque fois que j’ai fait une recherche, j’ai vu que j’avais un impact donc j’ai changé ma façon de faire. Je me suis dis : maintenant que je fais tout ce qu’il faut, c’est quoi l’étape d’après ? Il faut que fasse pousser ma bouffe (rire).
Tu avais cette volonté de tendre vers l’autonomie alimentaire ?
Ouai et donc je me suis dit que ce n’était pas en vivant en colloc à 4 à Paris que j’allais y arriver (rire). Et puis j’en pouvais plus de Paris.
En fait je voulais être en accord avec mes principes. Je me rendais bien compte que notre système ne tournait pas rond qu’on allait dans le mur et qu’il fallait tous que l’on retrouve un maximum d’autonomie, de résilience et de sobriété. Et ce n’est pas possible en ville. J’avais aussi envie de me rapprocher du surf et je ne supportais plus Paris.
J’ai jamais aimé Paris en fait, tout ce stress, toute cette violence. Je suis très sensible et je trouve que c’est d’une violence à tout point de vue. Sur les inégalités, sur la saleté, sur la violence physique, sur la surpopulation, cette concentration de personnes qui fait que l’on est de moins en moins agréable, on respecte et on fait de moins en moins attention à l’autre. J’ai vécu des situations surréalistes à Paris et je ne pouvais plus le supporter, c’était trop pour moi.
Tu t’es lancé dans une démarche de reconversion professionnelle ou tu souhaites garder ton métier actuel ?
Comme j’ai conscience de l’effondrement, j’ai conscience que je vais finir agriculteur, parce que j’aime ça. J’essaie réellement d’acheter une ferme, je travaille avec un agriculteur avec qui je projette de m’associer et j’ai repris l’école pour passer mon diplôme d’agriculteur. En revanche tant que ce système tiendra debout je continuerais de faire ce métier parce que je prends beaucoup de plaisir à le faire.
Et puis tu joues un rôle utile dans la société par rapport aux messages que tu passes ?
Ouai mais quand tu es agriculteur tu as aussi une super utilité quand tu fais bien ton métier. On ne se rend pas compte mais les gens qui font de l’agriculture, ce sont des héros en fait. Ce sont les seuls vrais écolos qui améliorent notre planète. Un écolo qui vit en ville, ok il fait du mieux qu’il peut mais il n’améliore pas la planète. Personne n’améliore plus la planète qu’un agriculteur.
Sauf si tu prends en compte les effets indirects. Si tu éveilles les consciences, indirectement tu améliores la planète ?
Oui oui c’est vrai. Mais c’est très concret l’agriculture. Ce que j’aime dans ce métier c’est de recréer de la vie, c’est un bonheur incroyable.
Par contre le risque est de perdre ce que tu as réussi à faire avec ta chaîne YouTube à savoir avoir un impact à une large échelle.
Effectivement mais rien ne t’empêche d’être agriculteur et de communiquer sur ton activité pour toucher un plus large public. Le fait d’être agriculteur te donne une légitimité. Ce n’est pas parce que je deviendrais agriculteur un jour que je ne continuerais pas d’éveiller les consciences, au contraire je serais encore mieux placé pour en parler.
Quel est ton rapport à l’argent ?
Un truc qui m’énerve, c’est que dans la tête des gens tu n’as pas le droit de gagner de l’argent quand tu dis ou tu fais des choses bien. Au contraire. On va trouver ça normal qu’il y ait des gens qui détruisent la planète qui gagnent des millions voir des milliards d’euros mais qu’un gars ou une fille qui essaie d’améliorer le vivant gagne quelques dizaines de milliers d’euros ça choque. Au contraire ce sont les gens qui réveillent le monde qui devraient être milliardaires, pas des patrons de CAC 40 ou des footballeurs.
Tu arrives à trouver le compromis en terme de localisation pour à la fois pratiquer le surf tout en ayant un peu de terrain pour cultiver ?
Oui, j’habite à Capbreton. Donc effectivement je suis très proche je suis à 5 minutes à vélo de la plage. Mon pote qui a sa ferme chez qui je travaille est juste derrière Saint André de Seignanx. En fait c’est très marrant dans les Landes, à gauche de l’autoroute c’est très sablonneux et la terre coûte très cher et dès que tu vas à droite de l’autoroute (intérieur des terres), c’est de la vraie terre et ça coûte beaucoup moins cher. De sa ferme à la plage la plus proche (Labenne) il faut 20 minutes de vélo.
Depuis que tu as déménagé dans les Landes, quel est ton quotidien (avant confinement) ?
Déjà ça dépend si il y a des vagues ou pas (rire). Honnêtement je travaille en fonction des vagues. Si il y des vagues le matin je vais surfer le matin et je travaille l’aprem et le soir et si il y a des vagues l’aprem je travaille… rarement le matin (rire), on va dire plus la nuit.
Il n’y a pas de journée type parce que je travaille sur plusieurs projets en même temps. Avec TF1 j’ai une semaine de tournage par mois à Paris, J’ai un autre gros projet encore confidentiel avec le producteur de Cash Investigation avec un gros travail d’écriture. Je réalise un documentaire sur mon pote agriculteur. J’ai mon nouveau spectacle donc je suis en tournée. Je fais aussi des conférences. Donc vraiment je n’ai pas de journée type et c’est ce que j’aime dans mon métier.
Mais en gros quand je suis à Capbreton, c’est divisé entre surf, travail, promener mon chien en forêt heuuh et voilà (rire).
Et quelle place occupe le potager ?
En fait le potager c’est très peu de travail. Mon potager je le fais que le dimanche, un jour par semaine ou je fais que ça. Donc effectivement tous les jours je sors mes semis et je les arrose le matin mais c’est tout. C’est un loisir.
Par contre en ce moment, pendant le confinement, je travaille la journée aux champs pour un agriculteur. Et c’est le sujet du documentaire que je réalise. Comment montrer qu’un urbain peut apprendre le métier d’agriculteur au contact d’un agriculteur et comment un agriculteur peut faire revivre de la terre morte.
En fait il a récupéré 7 hectares de terre morte, c’est à dire qui a subit 30 ans de monoculture de maïs conventionnel. 90% de nos terres en France sont dépendantes du pétrole. Hors la production de pétrole est censée décroître à partir de 2025 si ce n’est avant avec la crise qui va arriver. Donc peut être que l’on aura une crise pétrolière dans les mois qui arrivent… Si on ne sait pas produire de la nourriture sans pétrole, on va vivre des famines en Europe. C’est grave.
Donc c’est tout l’objectif du documentaire de montrer aux gens que l’on peut produire en polyculture élevage des grands rendements de nourriture sans pétrole sur une terre abîmée puisque 90% de nos terres en France sont mortes. Donc ça permet de montrer deux choses. A la fois il y a de l’avenir pour l’agriculture si on s’en donne les moyens et des gens qui ne sont pas issus du milieu agricole comme moi peuvent apprendre ce métier.
Ça me fait la transition parce que dans mon entourage je vois pas mal de gens qui ont cette prise de conscience. Ils se rendent compte qu’il y a un effondrement à venir mais ils se sentent impuissants. Du coup ils rentrent dans un état d’éco-anxiété (solastagie). Comment les sortir de cet état et les remotiver ?
Je peux le raccrocher à la question que tu m’as posé tout à l’heure pourquoi je suis parti de Paris. A partir du moment ou tu te mets dans l’action tu arrêtes d’être anxieux. C’est l’action qui te sortira de ta zone de mal-être. C’est l’inaction face aux informations qui te rend parano et qui te rend immobile. A partir du moment ou tu te mets en action déjà tu te dis que tu fais de ton mieux et ça te donne bonne conscience.
Ce dont on ne se rend pas compte immédiatement et qui bloque aussi pas mal de gens, c’est cette fameuse phrase du « ouai pourquoi tu fais ça, tu es tout seul à le faire dans ton coin ça sert à rien ». Moi j’ai envie de claquer les gens à chaque fois que j’entends ça.
« Que tu le veuilles ou non quand tu te mets à faire quelque chose de positif les gens t’observent et instinctivement te copient. »
Parce que tu le fais tout seul dans ton coin les gens te prennent comme exemple et ils ont envie de le faire. Donc pour sortir de l’éco-anxiété il faut se mettre dans l’action. Si tu te dis la ville c’est de la merde alors casse toi à la campagne et fais un potager, arrête d’aller dans les supermarchés, rapproche toi des producteurs, arrête de prendre l’avion, en fait il y a plein de petits gestes. Le fait que tu changes ton comportement ça va changer les comportements autour de toi.
Et ceux qui te répondent « tu es gentil mais j’ai un loyer à payer, j’ai un emprunt, j’ai besoin de mon salaire et mon boulot est en ville » ?
Je leur pose la question : Est-ce que ton boulot est utile ou est ce qu’il sert l’effondrement ? On ne peut pas tout avoir, il faut choisir. Est ce que tu restes dans ton petit confort ? Tu ne peux pas dire à la fois on va dans le mur et en même temps garder un boulot qui fait aller dans le mur. Il faut régler le problème à la source. Quel est le vrai problème ? C’est qu’on aille dans le mur ou que tu perdes ton boulot ? Il faut être logique, sinon c’est le serpent qui se mord la queue.
Je pense qu’il y a toujours des solutions. Si ton boulot est en ville tu peux faire une reconversion professionnelle. Si ton boulot te plait tu peux éventuellement le faire à distance. Tu peux trouver un mi-temps. Il y a plein de gens qui ont franchi ce cap. C’est ça qui me rend positif, je connais plein de gens dans mon entourage qui avaient des boulots en ville, qui pensaient ne pas pouvoir faire autrement et qui aujourd’hui vivent à la campagne et font autrement tout en étant 20 fois plus heureux. Oui ils gagnent moins de pognon qu’avant, c’est vrai, mais ils s’en foutent car ils sont plus heureux et ils sont en accord avec leurs valeurs. Ils ne travaillent plus pour une entreprise qui détruit le vivant.
Quels conseils donnerais-tu à tous les riders qui veulent réduire leur impact dans leur pratique ?
Avec votre blog vous traitez déjà pas mal de sujets mais je peux te donner par exemple ce que je fais moi. J’ai des planches éco-conçues Notox, je garde mes combinaisons le plus longtemps possible avec un bon entretien et j’utilise de la wax naturelle Maison Rivage. J’ai vu que vous aviez fait un reportage sur cette marque d’ailleurs.
Et il faut arrêter de faire des surf trip en avion ! Tous mes potes qui habitent ici à l’année partent surfer en Australie, à Bali, au Costa Rica,… Ils prennent trois avions dans l’hiver et ça me casse les couilles… j’en peux plus !
Désolé, il fallait que je le dise (rire).
Moi je suis allé au Maroc en bus et c’était de la bombe. Et pour mon prochain surf trip j’ai envie de tester l’Irlande, l’Angleterre, le Portugal, l’Espagne, la Norvège. Le conseil c’est de trouver des surf trips rigolos à faire sans prendre l’avion. Et plus tu vas faire ton surf trip loin et sans avion et plus tu vas kiffer le voyage. J’ai rencontré un mec au Maroc qui est parti d’Autriche avec son van. Il a longé pendant 6 mois toute la côte depuis la Bretagne jusqu’au Maroc et il a surfé tout le long.
L’avion ça me soûle. C’est trop facile. Tu prends l’avion… boum tu es dans un autre spot. Tu consommes et une fois de plus tu es dans le “profit”. Et dans la notion de profit, il y a une contrepartie, il y a quelqu’un qui trinque. Quand tu prends l’avion c’est le vivant qui trinque.
Et dans le même style j’ai rencontré un mec super sympa à Imsouane au Maroc c’est Pierre de The Commodore Hostel.
Tu as déjà essayé les planches en bois ?
Non mais j’aimerais trop tester. Je me dis si ça fonctionne bien ça vaut le coup c’est une planche que tu vas garder à vie.
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Quel type de surf tu pratiques ? plutôt engagé radical ou cool ?
Je suis un passionné, ce que j’aime c’est prendre du plaisir. Pour le coup je suis un gros consommateur. J’ai un 9 pieds, un fish, un 7 pieds et un shortboard 5’8 et je voudrais m’acheter un stand up paddle. J’aime varier les plaisirs.
Et le foil ?
Je n’ai jamais essayé mais je ne sais pas pourquoi ça ne me parle pas le foil. Je ne suis pas fan du gros aileron en carbone.
Qu’est ce que tu penses de notre poncho de surf upcyclé Ponchouille ?
J’ai répondu au questionnaire. C’est très bien parce que le poncho, on en veut tous.
Quand tu y penses c’est une fois de plus une histoire de confort. Les surfeurs hippies, ils mettaient tous le cul et la bite à l’air et ils en avaient rien à foutre d’avoir un poncho (rire).
Non non je plaisante. Je suis bien content en automne/hiver d’avoir un poncho.
C’est très bien parce que vous êtes dans de l’upcycling et que c’est exactement ce qu’il faut faire. Il faut arrêter de produire on a largement produit assez.
Et le côté unique et dépareillé colle bien avec la démarche. Après il faut que vous arriviez à le rendre joli. D’un manière générale il faut arriver à rendre sexy l’écologie. C’est pour ça que je fais mes story potager. Quand tu vois des vidéos de potager c’est souvent un peu chiant. Il faut arriver à rendre sexy les trucs écolos. Donc moi je trouve ça génial qu’ils soient tous différents parce que en plus ça fait une pièce unique.
Et quels sont tes projets à venir ?
Désolé d’être pessimiste mais je ne sais pas quand le confinement va s’arrêter et je ne sais pas si ça ne va pas être la grosse merde en fait. Si on était avant le confinement je te dirais mes projets c’est mon émission sur le web avec le producteur de Cash Investigation qui va être une tuerie (rire). Le projet de documentaire sur l’agriculture dont j’ai parlé avant. Je suis sur TF1 le weekend pour toucher un autre public, beaucoup moins engagé mais beaucoup plus large, et ce sont les premiers que l’on doit sensibiliser. Et puis j’ai mon nouveau spectacle qui doit être en tournée mais qui est suspendu.
En fait tout pour l’instant est à l’arrêt. Et comme tout ça c’est du divertissement je ne suis pas certain que c’est là ou il y aura le plus de pognon en temps de crise donc je ne sais pas si on va continuer à pouvoir produire ces projets. Si il y a une grosse crise je pense que les gens préféreront s’acheter des pommes de terre plutôt qu’une place de spectacle.
C’est incroyable mais ça ne m’inquiète pas, je me dis qu’au pire je suis prêt à être agriculteur dès demain.
Qui serait le futur Green Rider à interviewer ?
Tous ceux auquel je pense vous les avez déjà interviewé. Je trouve que c’est le gros problème du milieu de la glisse. Malgré le fait que l’on soit en contact direct avec notre environnement, il y a de moins en moins de gens qui en prennent soin. A la base le surf c’était quand même des hippies, des gens qui étaient connectés à leur environnement. Maintenant il y a vraiment un gros mouvement de surfeur consuméristes et les marques mettent en avant ces gens là.
Il y a un mec que je suis alors que je le déteste c’est Jamie O’Brien. Il a une chaîne YouTube et il fait un vlog, il filme toutes ses journées. Ces vidéos sont sponsorisées par Redbull, Catchsurf et sa propre marque. Dans toutes les vidéos il boit et met en avant du Redbull, il place des pubs et on le voit tout le temps en train de rouler en 4×4, de prendre l’avion, de faire du buggy… Bref c’est un énorme pollueur. Et les marques mettent en avant ce genre de personnalité et ça me dégoûte.
Tu peux interviewer Pierre Pomiers le créateur de Notox.
Encore une belle rencontre! Je file sur YT écouter La Barbe…
Merci les gars 🙂
Super interview qui donne beaucoup d’envies de changer sa conception de la vie, mais à 89 ans c’est trop tard hélas!
Je ne connaissais pas Nicolas Meyrieux avant de lire votre article mais j’adhère totalement à sa vision des choses. Il a résumé largement et simplement ce que pensent et mettent en pratique beaucoup de personnes…mais il nous reste beaucoup à faire tous ensemble ou individuellement, chacun à notre rythme mais toujours dans le bon sens.
Merci à lui
Super interview!
J’étais tombé par hasard sur son émission TF1 une fois en me disant « TF1 aussi se met au greenwashing! ».
Finalement, je découvre une personnage qui me parle énormément. D’autant plus que je me lance en 2021 dans une reconversion professionnelle (informaticien pour devenir maraîcher).
Bref, ça fait plaisir!
Merci pour cette découverte qui donne du courage pour tenir.
J’aimerais pouvoir entrer en relation avec Nicolas en rapport avec son projet agricole. Je vis dans le coin.
Si vous pouvez transmettre mes coordonnées s’il veut me contacter.
Célia
Salut Célia,
Merci beaucoup pour ton message. Pour rentrer en contact je te conseille de lui envoyer un message privé sur Insta 😉